La première fois que j’ai entendu cet acronyme, je me suis dit : « Mais enfin, tous les bébés sont des baby« ! Erreur orthographique : BABI, pas BABY. Car si tous les BABI sont des baby, tous les bébés ne sont pas des BABI.

Un BABI, c’est un Bébé Aux Besoins Intense, appelé High Needs Baby en anglais, selon la formule du Dr. Sears.

La première fois qu’on m’a dit que ma fille était peut-être un BABI, j’ai répondu : « Enfin, tous les bébés ont des besoins importants. Ma fille est exigeante, mais c’est normal. » C’était sur facebook ; une maman, alertée par mes différents statuts sur ma fille, m’a dit qu’elle était sûrement un BABI. Cette maman savait de quoi elle parlait puisque son fils est un BABI. Elle m’a conseillé de lire ces articles (entre autres) 12 Features of a High Need Baby (en anglais), Éveil de bébé : qu’est-ce qu’un bébé aux besoins intenses?Comportement d’un bébé aux besoins intenses.

Au début, j’ai refusé de coller cette étiquette sur ma fille. Me disant que comme j’étais une toute nouvelle maman, je découvrais mon nouveau rôle et j’avais juste du mal à m’en sortir. Tout était normal, ma fille était juste un petit bébé qui avait besoin de sa maman. J’étais fatiguée, mais c’était le temps de trouver notre rythme.

Et puis à chaque rendez-vous chez le médecin, tous les mois, les mêmes mots :

– Votre fille est dynamique!

– Oui, je dirais même qu’elle est épuisante!

[…]

– Comment est son sommeil?

– Haché, coupé, bref. Elle ne dort pas la nuit, ne fait pas de siestes…

[…]

– A-t-elle acquis un rythme?

– Un rythme? Non. Elle a un rythme pendant une semaine maximum et ensuite c’est fini.

[…]

– Elle pleure beaucoup?

– Elle ne pleure pas, elle hurle! Beaucoup. Même si je la berce, même si je la console.

[…]

– Vous avez l’air fatiguée. 

– Je suis épuisée.

*

J’ai finalement dû me faire à l’idée : ma fille est un BABI. C’est comme ça.

Selon le Dr. Sears (Que faire quand bébé pleure, vivre avec un bébé aux besoins intenses), un bébé présentant un ou plusieurs des aspects développés ici est certainement un BABI. La plupart de ces points s’appliquent à Bichette.

Hypersensible

Dès sa naissance, on a constaté un fort réflexe de Moro qui la réveillait brutalement. Depuis, on s’est rendu compte qu’elle ne dort jamais d’un sommeil profond. Elle  sursaute au moindre bruit, se réveille en pleurant (non, en hurlant, Bichette ne pleure pas, elle hurle). Si on n’accourt pas, elle hurle de plus en plus fort et a beaucoup de mal à se calmer.

Le Dr. Sears pense que le BABI est hypersensible « surtout avec  les personnes qui ne lui sont pas familières ». Ce n’est pas le cas chez nous. Bichette a besoin d’être entourée. Toujours. Elle ne supporte pas d’être seule. Elle est très sociable et souriante, même avec les inconnus. 

Intense

Le bébé aux besoins intenses fait tout intensément : Bichette pleure très fort, rit très fort aussi, peut passer de l’un à l’autre en quelques secondes. Ses protestations sont intenses et énergiques, elle a besoin qu’on réponde à ses demandes immédiatement sinon elle se met dans un état incroyable. Dès qu’on s’éloigne, qu’on sort de son champ de vision, même quelques minutes (le temps d’aller aux toilettes, de préparer le bain par exemple), elle panique, les larmes coulent, elle hurle. On sent une réelle détresse. Dès qu’elle nous voit à nouveau, elle s’arrête immédiatement de pleurer et tend les bras pour être réconfortée.

Mercredi midi, j’ai joué à « caché-coucou » derrière la porte du salon. Elle s’est mise à hurler quand je me suis cachée et a ri très fort quand elle m’a vue réapparaître. C’était impressionnant.

Exigeant

Le Dr. Sears précise que ces bébés ne sont absolument pas capricieux. Mais comme tous leurs sentiments sont intenses, exacerbés, ils ont besoin d’un réconfort immédiat. Bichette est incapable de se calmer seule. Combien de fois m’a-t-on dit qu’elle devait « apprendre à se calmer seule », que je la « couvais trop », qu’en répondant immédiatement à ses besoins, j’en faisais « une petite fille capricieuse ». Nous avions beau expliquer que cela ne fonctionnait pas comme ça avec Bichette, qu’elle exigeait une réponse urgente de notre part, j’avais l’impression, aux yeux des autres, d’être une mauvaise mère. Après quelques jours chez ma mère et chez mes beaux-parents, ils se sont rendus compte qu’effectivement, la laisser pleurer ne faisait qu’accentuer les hurlements. Rien ne la calme, ni les peluches, ni la tétine, ni les paroles (d’ailleurs je crois qu’elle se ferme et ne m’entend plus). Elle a besoin de trouver mon regard et mes bras.

Impossible de le déposer 

Bichette a un très grand besoin de contact physique. Très tôt elle a tendu les bras vers nous pour que nous la prenions. Il est difficile de la poser. Quand on le fait, que ce soit sur son tapis ou dans sa chaise haute, il faut que nous soyons à portée d’yeux.

Quand je la mets dans sa poussette ou dans le cosy, elle hurle car elle déteste être bloquée, attachée. Parfois je fais une balade de 2h en ville ou dans le parc près de chez moi mais elle ne ferme pas les yeux : tout l’intéresse! Elle est très curieuse. Le vent dans les feuilles des arbres, les bruits des voitures, les klaxons, les bavardages… tout attire son oreille. Elle veut tout voir, tout entendre, ne rien rater. Et bien souvent, elle ne s’endort que quand on arrive à la maison (et se réveille en sursaut quand l’ascenseur arrive à l’étage). Heureusement, en voiture, quand on démarre, elle se calme et s’endort la plupart du temps.

Toujours actif

Bichette est toujours en mouvement. Depuis sa naissance, je ne compte plus les fois où on m’a dit : « Qu’elle est éveillée pour son âge! » « Quel dynamisme! ».

Le médecin est aussi épaté par son activité motrice : « Je pense qu’elle marchera tôt! ».

Elle acquiert très rapidement de nouvelles compétences. Elle a rapidement appris à se tourner et se retourner : ventre-dos, dos-ventre… assise elle se lance en avant et une fois sur le ventre, essaie de ramper… Elle tend les bras et remonte les genoux, se tortille pour essayer d’avancer mais n’y parvient pas alors elle s’énerve, hurle… vous connaissez la suite.

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Épuisant

C’est le mot qui la qualifie le mieux : épuisante! Ça fait 6 mois que je n’ai plus une minute à moi. Aller aux toilettes relève du parcours du combattant, prendre une douche seule, c’est mission quasi impossible. Je ne compte plus les douches prises à 15h, celles prises avec bébé qui me regarde bien installée sur son tapis ou dans son transat. Préparer à manger, c’est du vite fait, faire le ménage c’est difficile puisque Bichette ne fait pas de siestes.

Quand j’ai quelques minutes à moi, je me pose un peu pour souffler. Jamais bien longtemps.

Il n’aime pas se blottir

Elle veut toujours les bras, mais n’aime pas être blottie contre nous. C’est paradoxal. C’est caractéristique d’un BABI.

Bichette a besoin de beaucoup de contact physique mais quand on la prend, elle se raidit, se tortille. On appelle cette raideur musculaire « hypertonie » : elle arque le dos et raidit ses bras et ses jambes, proteste quand on la met dans l’écharpe ou l’ergobaby, n’accepte pas que je la pose sur moi pour l’allaiter (elle préfère être allongée contre moi comme ça elle peut gigoter à son aise en tétant, prendre ses pieds, se dandiner). Déjà, dans mon ventre, on avait remarqué cette hypertonie…

C'est elle qui décide de la position à adopter.
C’est elle qui décide de la position à adopter.

Quand elle était toute petite, on a essayé l’emmaillotage. Ça a été catastrophique. Elle se débattait, se tordait. Elle a besoin d’espace. D’ailleurs, on a rangé toutes les turbulettes : Bichette déteste être enfermée. On a opté pour un surpyjama qui laisse ses jambes libres.

Elle n’accepte les moyens de portage que si je bouge. L’écharpe est rangée, je ne peux plus la mettre dedans car elle est trop près de moi, trop serrée, pas libre de ses mouvements. Par contre, dans l’ergobaby, ça va encore… si je ne reste pas immobile. Alors je bouge (je fais le ménage, je cuisine, je me promène). Parfois elle s’endort mais si j’essaie de l’enlever du porte-bébé pour la coucher dans son lit quand je pense qu’elle dort profondément, elle se réveille immédiatement.

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Insatisfait et imprévisible
 

A chaque fois qu’on a pensé avoir trouvé un « truc » pour la calmer, ça a duré deux, trois fois et puis c’était fini. Le mobile, la veilleuse, les caresses, les massages, les chansons, les histoires… tout ça fonctionne un temps (généralement c’est une semaine) puis ça s’arrête, il faut trouver autre chose.

Ce qui marche vraiment, ce sont les bras de papa et maman, et surtout le sein de maman.


Il veut téter tout le temps

Bichette est née avec le pouce dans la bouche : quand elle est sortie de mon ventre, elle avait la main sur la joue, j’ai sorti son bras en même temps que sa tête, la sage-femme n’avait jamais vu ça!

Dès qu’on l’a posée sur moi, elle a cherché à téter et on s’est vite rendu compte qu’elle a un énorme besoin de succion. Ça la réconforte. Elle a pris le pouce un moment mais ensuite elle n’en a plus voulu, comme on ne pouvait pas lui donner notre petit doigt en permanence, on a investi dans une tétine, mais maintenant elle commence à ne plus en vouloir et préfère téter… ses peluches!

Elle a besoin de téter, pas pour se nourrir, mais pour être réconfortée. Elle frotte sa tête contre mes seins et tète tout ce qui se présente (pull, tee-shirt, etc.) si je ne lui donne pas le sein.

Il se réveille souvent

Elle dort peu et se réveille souvent. Depuis qu’elle a un mois, elle fait ses nuits par périodes. Ça dure une semaine ou deux. Et puis elle se dérègle à nouveau. Puis elle se remet à dormir la nuit.

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Dans la journée, c’est plus compliqué. Elle dort généralement 45 minutes le matin, 45 minutes l’après-midi, jamais à la même heure. Quand elle dort toute la nuit, elle ne fait pas de sieste le matin, mais dort parfois 1h30 en début d’après-midi. Ce n’est jamais régulier.

Le cododo nous a souvent sauvés et permis de faire des grasses matinées le dimanche.

*

Je pense avoir fait le tour. Ma fille est un BABI, elle remplit tous les critères. Elle a besoin d’être sans cesse rassurée, réconfortée. C’est épuisant. Je suis plus que fatiguée. Parfois (souvent, en ce moment), je pleure quand elle pleure. J’essaie de dormir quand elle dort ou au moins de me poser et je ne fais rien. Mon appartement n’est pas rangé, je ne suis pas coiffée mais je m’en fiche, je savoure ce moment de tranquillité.

En ce moment, je suis à bout. Je pleure presque tous les jours. Quand elle se réveille la nuit, j’angoisse. Elle ne se rendort pas facilement alors elle s’énerve, je m’énerve aussi. Je m’excuse. Je la pose dans son lit, lui demande de s’endormir. Je lui parle beaucoup. Je lui dis tout ce que je ressens, tout ce que je vais faire. Je suis épuisée. Je me demande si on peut mourir de fatigue. Je sens la migraine monter, se former. Je sens les cernes se creuser.

Un jour on pleure, on est épuisées. Le lendemain, on est sourire et bonheur. Ma fille est un BABI et je suis sur un fil, j’oscille entre jours de déprime et euphorie, entre pleurs de fatigue et pleurs de joie. Le Conquérant a pensé que je faisais un baby blues ou un burn out maternel. Non, je vis avec un BABI.

Je culpabilise. A propos de tout. Je me sens une mauvaise mère. Et une mauvaise compagne car je suis tellement crevée que notre couple en souffre. Heureusement j’ai un Conquérant formidable (pas très patient, mais plein d’amour).

Je me pose beaucoup de questions. Est-ce que c’est de ma faute? Est-ce que c’est parce que j’ai été stressée pendant la grossesse? Parce que j’ai eu tellement peur de la perdre? Parce que je n’ai pas aimé être enceinte les premiers mois? Est-ce parce qu’on a déclenché sa naissance? Est-ce parce que j’étais aussi un BABI? Est-ce que c’est héréditaire? Comment va-t-elle grandir? Comment va évoluer notre relation? Est-ce qu’elle va accepter la séparation? Dois-je préférer une nourrice ou une crèche? Est-ce que je vais pouvoir me reposer un jour? Est-ce que je vais arrêter de pleurer?

*

Pour le moment, je ne travaille pas, je me consacre entièrement à elle. Mais dans quelques semaines, il va falloir que je me remette à travailler, que je laisse ma fille de 7h à 19h30 à une inconnue. Ça va être compliqué…

*

Le docteur Sears propose des solutions pour les parents de BABI. Je vous en parlerai dans un prochain billet (j’ai mis plus de trois semaines à écrire celui-ci, j’écris quelques minutes par jour, quand bichette me laisse un peu respirer).

Si vous aussi vous avez un BABI, n’hésitez pas à me laisser un commentaire pour partager votre expérience. Je me sens tellement seule et désemparée…

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