Avec ce titre, pas besoin de préambule, j’entre directement dans le vif du sujet. J’avais déjà, sur ce blog, en 2013, poussé un petit coup de gueule sur le fait que le sexe féminin est méconnu et qu’on utilise mal le vocabulaire lié à son anatomie (à relire ici : Vulve et vagin : révise ton anatomie).

Quatre ans plus tard, rien n’a changé. Les (nombreuses) recherches internet menant sur ce billet montrent que les deux termes sont souvent confondus et même que le mot « vulve » est la plupart du temps inconnu. Alors qu’est-ce qui m’amène à ce nouveau coup de gueule?

Dans son livre intitulé Quand ça va, quand ça va pas, le docteur Michel Cymes explique aux enfants de 4-5 ans (et à leurs parents), le corps humain.

Forcément, plusieurs pages sont consacrées aux organes génitaux. Mais le traitement réservé aux deux sexes est très inégal. Résumons (les images concernées sont à retrouver ici : The Nasty Uterus – La rage de l’utérus). Le petit garçon a un zizi, appelé aussi pénis. Il a droit à un beau schéma légendé. Avec des termes précis : testicules, urètre, etc. La petite fille a une « zézette », jamais une « vulve » et son sexe est limité à sa fonction urinaire avec un schéma très simplifié où n’apparaît que l’urètre. Le sexe du petit garçon a une fonction érectile et permet la reproduction sexuelle humaine. Celui de la fille? Non… ce n’est jamais évoqué. Le sexe féminin est juste un trou par lequel s’écoule l’urine. La « zézette » est sujette aux mycoses (sans doute parce que les filles manquent d’hygiène, puisqu’un rouleau de papier toilette est dessiné d’un côté et de vilains microbes nagent dans l’urine) et aux rougeurs. Bref, le sexe féminin est sale, malade et honteux… alors que le sexe masculin, sur les pages précédentes, se dresse fièrement, avec des petits garçons souriants et heureux.

Alors… je suis prof et maman. Et en colère.

La prof sait, par ses collègues de SVT, que les élèves de 4ème, lorsqu’ils étudient la reproduction humaine, croient tout savoir de la sexualité mais qu’ils n’en connaissent rien. La plupart des garçons et des filles connaissent les éléments principaux du sexe masculin : le pénis et les testicules (même s’ils ont souvent des noms bien différents -b… et c…). Mais lorsque vient le tour du sexe féminin, rien. Pas un mot. Ou le doux nom d’un animal qui les fait beaucoup rire… Ni les garçons ni les filles ne connaissent la vulve, les lèvres, le clitoris. Parfois le mot « vagin » est connu, mais bien souvent le terme est mal utilisé : il serait LE sexe féminin dans son ensemble. Les collègues doivent donc apprendre aux ados (dont certains ont déjà une vie sexuelle) les bases de l’anatomie de ce sexe méconnu.

Je suis maman. Ma fille a 3 ans et demi. Elle sait que sa « nénette » s’appelle aussi une vulve. Qu’elle a des lèvres, petites et grandes, qui protègent le « trou par où sort le bébé » (elle n’a pas retenu le terme de vagin). C’est pas compliqué d’appeler un chat un chat et une chatte une chatte… c’est la base. Non?

Ma fille sait aussi que sa vulve peut être rouge et faire mal, que ce n’est pas un manque d’hygiène ou un problème d’essuyage. Le médecin lui a bien expliqué qu’il ne faut pas trop la laver et surtout pas avec un savon agressif. La « petite fleur » est fragile et on doit en prendre soin.

Bichette sait que son frère a un zizi. Elle a même remarqué que « celui de [s]on papa est plus gros ». Comme ma vulve est plus grande que la sienne. Elle sait que notre sexe ne sert pas qu’à uriner. Elle a vu mon ventre s’arrondir et elle a demandé par où sortirait le bébé. Je le lui ai expliqué et elle a semblé satisfaite de ma réponse : les lèvres de la vulve s’écartent et laissent sortir le bébé.

Je n’ai ni honte ni peur d’utiliser les VRAIS mots. Au contraire. C’est important de bien nommer les choses. Parole de prof de lettres. Les mots sont importants. Et les livres pour enfants sont de bons appuis pour expliquer les choses aux plus jeunes. Je ne pourrai pas utiliser ce livre avec ma fille. Il est bien trop incomplet et, disons-le (puisqu’il faut employer les bons mots), sexiste. En 2017, je trouve ça tellement dommage que les ouvrages destinés aux enfants continuent de véhiculer une image négative du sexe féminin. Non, il n’est pas sale, malade, honteux. Le sexe féminin est beau. Il est sacré. Il donne la vie mais il n’a pas uniquement une fonction reproductrice (les règles, la fécondation, la grossesse, l’accouchement). Le sexe féminin donne aussi du plaisir avec un clitoris qui n’a qu’une seule fonction, liée uniquement au plaisir sexuel.

Apprenons à nos enfants les mots appropriés pour TOUTES les parties de nos corps. Apprenons-leur les bons termes car aucun élément de notre corps n’est honteux. Apprenons l’anatomie féminine aux petites filles et aux petits garçons comme nous leur apprenons l’anatomie masculine. Apprenons aux petites filles à être fières de leur corps et aux petits garçons à les respecter. C’est comme ça que nous progresserons contre le sexisme. C’est comme cela que garçons et filles seront égaux.